Jean-Christophe Glaszmann, chercheur au Cirad
- Création : 27 octobre 2008
Le mercredi 1er octobre 2008, au cours d'une cérémonie au ministère de l'agriculture et de la pêche, le prix Jean-Dufrenoy de l'Académie d'Agriculture de France a été décerné à Jean-Christophe Glaszmann, chercheur en biotechnologie au Cirad.
« C’est un honneur pour moi d’être ainsi associé à Jean-Dufrenoy, chercheur et enseignant d’exception en agronomie et physiologie végétale » déclare Jean-Christophe Glaszmann*, « et j’ai le privilège de travailler dans un centre de recherches appliquées qui me permet de concilier le plaisir pur de la recherche et la satisfaction de me rendre utile aux populations défavorisées ». Il ajoute « la diversité des plantes cultivées est un sujet inépuisable. Grâce aux partenariats que nous développons, et grâce à la qualité de l’environnement scientifique montpelliérain, les plantes du Sud sont au coeur de l’innovation ».
Légataire de Jean-Dufrenoy et de sa sœur Marie-Louise, et sur leur recommandation, l’Académie d’Agriculture de France remet chaque année le prix Jean-Dufrenoy (5000 euros) à un chercheur français. Il est précisé que ses travaux doivent se caractériser par leur originalité, les résultats avoir fait l’objet d’une critique statistique et donner lieu à des applications pratiques au bénéfice de l’agriculture.
C’est donc pour l’ensemble de ses travaux et particulièrement pour ses recherches innovantes « en matière de génétique et de génomique des espèces d’intérêt en milieu tropical » que Jean-Christophe Glaszmann reçoit le prestigieux prix spécial de l’Académie d’Agriculture.
Une carrière embrassée avec succès
Ingénieur agronome, Jean-Christophe Glaszmann, a soutenu une thèse sur la diversité génétique du riz et poursuivi ses travaux de 1982 à 1987 à l’Institut international de recherche sur le riz aux Philippines. Il a ensuite développé avec son équipe du Cirad, à Montpellier, la génétique de la canne à sucre, graminée au génome des plus complexe, sur la base de comparaisons avec des espèces voisines plus simples, comme le sorgho, le maïs ou le riz.
Après avoir dirigé une unité mixte de recherche sur les « Polymorphismes d’Intérêt Agronomique » chez des plantes méditerranéennes et tropicales, Jean-Christophe Glaszmann prenait en 2007 la direction du département bios (Systèmes biologiques) au Cirad – ce département mène des recherches dans le domaine du vivant, de sa caractérisation et de son exploitation.
Depuis 2004, Jean-Christophe Glaszmann consacre une part importante de son temps à la conduite d’un programme international intitulé Generation Challenge Programme où il s’agit d’appliquer la génomique comparative pour mobiliser la diversité génétique et améliorer les principales espèces vivrières mondiales.
* Directeur du département bios (Systèmes biologiques) au Cirad et membre de l’équipe de direction du Challenge Programme « Generation » du GCRAI (Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale).
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Le prix est octroyé à des chercheurs dont les travaux ont été inspirés par l’œuvre de Jean Dufrenoy. Il est notamment question ici d’innovation. Qu’en est-il de vos travaux ?
Mon travail de thèse a porté sur la classification génétique du riz. A l’époque, nous avons utilisé des marqueurs biochimiques – on utilise aujourd’hui des marqueurs moléculaires – pour obtenir une estimation de la diversité génétique du riz. Cela a constitué une grande nouveauté. La publication qui a été tirée de ces travaux constitue encore aujourd’hui une référence. Cette classification a grandement facilité le travail des sélectionneurs.
Puis, du génome du riz, extrêmement simple, je suis passé à un génome des plus complexes, celui de la canne à sucre. Mais les deux plantes sont toutes deux des graminées. Aussi, à l’aide de marqueurs moléculaires et des cartes génétiques alors disponibles, on a pu constater que les deux espèces disposaient de génomes très proches. Ce résultat a ouvert la voie à la cartographie des génomes complexes.
Aujourd’hui, d’autres travaux sont en cours sur le sorgho. Alors que les plantes utilisées pour l’agriculture ont été domestiquées par prélèvement à partir d’espèces sauvages, on est en train de montrer, par la génétique, que, si elles ont perdu une part de leur diversité originelle, elles ont aussi accumulé de nouvelles formes de gènes, qui leur sont propres. L’agriculture créatrice de biodiversité, c’est une idée nouvelle qui ouvre des pistes pour la recherche en agronomie.
Que représente ce prix pour vous ?
Je suis bien sûr très honoré. Je me réjouis notamment de voir mon nom associé à ceux de grands agronomes comme Jean Dufrenoy. C’est pour moi une grande reconnaissance. Et puis, je me réjouis également car le prix est habituellement décerné à de jeunes chercheurs. Le recevoir constitue un encouragement à persévérer dans la pratique de la recherche.
A l’heure actuelle, c’est pourtant d’autres responsabilités qui vous accaparent…
En effet, depuis bientôt deux ans, je suis directeur du département Systèmes biologiques au Cirad. Les activités de recherche de ce département portent sur la diversité, la biologie et le fonctionnement des organismes ainsi que sur les relations qu’ils entretiennent entre eux, à l’échelle du génome, de la cellule, de l ’organisme et de la population. A cette fonction de direction s’ajoute celle de la coordination de recherches internationales que je conduis pour le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (GCRAI). Je coordonne le sous-programme « Diversité génétique des ressources génétiques globales » du Generation Challenge Programme. Ce sous-programme mobilise toutes les technologies offertes par la génomique. L’objectif est de mettre en valeur la diversité des ressources génétiques parmi les espèces vivrières mondiales. Il s’agit également de développer des variétés nouvelles, mieux adaptées aux besoins des petits agriculteurs, notamment vis-à-vis de la sécheresse.
Votre travail touche à la recherche fondamentale mais vous conservez, en ligne de mire, l’application sur le terrain ?
Tout à fait, nous travaillons en relation directe avec les sélectionneurs dans les pays en développement. Aussi, je suis conscient d’être privilégié : je travaille dans un institut de recherche appliquée où je peux concilier le plaisir pur de la recherche et la satisfaction d’un engagement pour les populations des pays du Sud.
Source : www.cirad.fr