Agrumes et primeurs : le rouble et la livre malmènent l'export
- Création : 29 janvier 2009
De graves menaces planent sur les exportations d’agrumes et primeurs. Du moins pour la seconde moitié de la campagne d’exportation qui vient d’être entamée. D’ores et déjà, les professionnels envisagent de revoir à la baisse les prévisions des exportations arrêtées pour les agrumes et primeurs.
Et pour cause ! La vague de dépréciation des monnaies des principaux pays importateurs suite à la crise économique qui y sévit. Dans la foulée, le rouble a perdu 30% de sa valeur, la livre sterling dont le taux de change avoisinait les 15 DH, il y a quelques mois, n’est échangée qu’à 11 DH. Même la parité de l’euro par rapport au dirham a chuté de 30 centimes. Il en est de même du dollar canadien qui a aussi amorcé une tendance à la baisse. «Face à cette situation, point de visibilité», indique Abderrazak Mouisset, président de l’Association des producteurs exportateurs des fruits et légumes (Apefel). Autrement dit, «primeuristes et agrumiculteurs subissent de plein fouet les effets de la crise internationale», commente le président de l’Apefel. C’est pourquoi la profession réclame un fonds de garantie du taux de change. Car des faillites en cascade risquent de toucher de nombreux opérateurs. D’ailleurs, le secteur de la confection subit un scénario similaire.
Pourtant, la campagne a connu un très bon démarrage. «C’est pour la première fois dans les annales de la profession que le Maroc a expédié 2.000 tonnes par semaine», se félicite le président de l’Apefel. Le marché était, en effet, bien dégagé du fait de la baisse de production chez le principal concurrent, l’Espagne. Et les niveaux des prix s’avéraient relativement rémunérateurs. A tel point que les exportateurs dédouanaient dans le cadre des accords de l’Organisation mondiale du commerce. Histoire de ne pas être handicapés par le calendrier imposé par l’UE. Mais la tendance s’est retournée juste après les vacances de fin d’année. Période qui se caractérise généralement par un repli de la consommation, notamment des fruits et légumes.
Révision à la baisse
Au total, 624.000 tonnes d’agrumes et primeurs ont été exportées à la date du 24 janvier. Selon l’Etablissement autonome de contrôle et de coordination des exportations (EACCE), les expéditions d’agrumes totalisent 300.000 tonnes contre 274.000 réalisées à la même période de la campagne passée. D’où une avance d’environ 30.000 tonnes d’une période à une autre. Ce qui dénote une précocité assez prononcée des petits fruits et notamment la clémentine. Plus de 60% des sorties sont constituées des petits fruits et en particulier de la clémentine du Souss (108.000 tonnes), de l’Oriental (53.000 tonnes) et de la région du Centre (25.000 tonnes). La variété Nour a pratiquement doublé ses exportations à la fin de la semaine dernière avec un volume d’environ 80.000 tonnes contre 40.700 réalisées à la même date de la campagne précédente. A l’opposé, les expéditions de la Navel accusent un recul de quelque 4.000 tonnes d’une période à l’autre : 18.600 tonnes au lieu de 24.700. De même, les tonnages des variétés de demi-saison comme la salustiana et les sanguines commencent à se développer. Selon la profession, la situation s’explique surtout par les conditions climatiques qui ont favorisé la croissance et la formation des fruits. De sorte que le profil du calibrage s’annonce nettement meilleur en comparaison avec la campagne 2007-2008. En tout, la production attendue est de l’ordre de 1,35 million de tonnes dont 650.000 seront écoulées à l’extérieur. Cette prévision était établie dans l’hypothèse où le climat s’avère favorable. Or, aussi bien le climat que la situation des marchés militent pour une révision à la baisse des exportations agrumicoles. Surtout à destination du marché russe qui absorbe désormais près de 50% des exportations d’oranges marocaines. Car, à la baisse tendancielle du taux du rouble s’ajoutent les restrictions imposées par les banques de ce pays quant à l’ouverture des lignes de crédit. Auparavant, signalent les opérateurs, les sociétés de financement russes accordaient des lignes sur plusieurs mois. Ces lignes sont consenties quasiment au mois.
S’agissant des primeurs, le volume exporté a atteint 324.300 au 24 janvier en amélioration de quelque 15.000 tonnes en comparaison avec la même période de la saison 2007-2008. Au total, les quantités expédiées en tomates se sont élevées à 215.000 tonnes contre 190.000 réalisées à la même date de l’année dernière. Sur ce volume, le Souss a exporté 208.000 tonnes alors que le Gharb et l’Oriental ont respectivement réalisé 5.000 et 1.500 tonnes. A noter toutefois la forte diversification, par produits et par marchés, qui caractérise de plus en plus le profil des exportations marocaines de primeurs et légumes divers. En tout, 101.500 tonnes ont été expédiées au 24 janvier, soit quasiment le même volume à pareille époque de l’année passée. Les tonnages des différentes variétés d’haricots prédominent: l’haricot helda, représente 24.000 tonnes. Il est suivi par les courgettes dont le volume exporté s’est établi à 23.500 tonnes. Alors que les poivrons et l’haricot vert totalisent quelque 38.000 tonnes. Les fruits divers (fraise, grenade et melon) commencent aussi à développer leurs exportations. Les expéditions de ces variétés ont atteint près de 6.000 tonnes en fin de la semaine dernière. De même, la diversification des débouchés est devenue une réalité pour l’ensemble des produits. Et le marché français, qui s’érigeait en principal débouché de primeurs marocaines, est actuellement mis à contribution avec les autres plateformes européennes de commercialisation. Mais les secteurs des agrumes et primeurs risquent d’être mis à rude épreuve, s’inquiètent les professionnels.
A. G.
Source : www.leconomiste.com